Ô directeur,
Toujours entre deux portes,
Deux ombres, ou deux couleurs.
A régler deux problèmes à la fois,
Ou répondre à deux questions en même temps,
Chacun attend de toi que tu te coupes en morceaux,
Et toi, tu ne peux en offrir plus d'un seul.
Morceaux de toi, morceau de choix,
Dans la bavette ? L'gîte à la noix ?
Et l'école devient boucherie.
Ou bien épicerie fine, c'est selon.
Tout le monde veut sa tranche,
Un fragment sur lequel chacun s'épanche :
" C'est pas d'ma faute, celle du voisin,"
" C'est pas un menteur, mon gamin, »
" L'est 'cor en r'tard, et c'est pas rien ! "
" L'était pas malade, ce matin ? "
" Les aut' l'embêtent à la récré, "
" Où a-t-il perdu tous ses cahiers ? "
" Et qu'est-ce qu'il a fait de son cache-nez ? "
Pour leur échapper,
Le directeur n'a qu'une idée :
Se mettre à courir comme un dératé,
Il court tout le temps, toute la journée,
Sans s'arrêter, ni se retourner,
Et personne n'ose le déranger.
Il court si vite qu'on ne le voit plus,
Et chacun croit qu'on l'a perdu,
Les parents :" Une école sans directeur ? Du jamais vu ! "
Les élèves : " Ho, Directeur, t'es où ? On continue ? "
Les collègues : " Y'a plus personne, on est foutus ! "
L'inspecteur :
" Quoi ? Une école sans rien au-dessus ? "
Six-heures et quart, le réveil sonne.
Le directeur ne rigole plus,
Finis les rêves un peu tordus,
L'est temps de regagner la tribu,
Un peu fourbu, toujours barbu ...