Voila. C'était en 1978. J'ai retrouvé ces trois photos, dans une caisse l'autre jour. J'avais vingt, vingt-et un tout au plus. Plus vraiment ado, pas encore tout à fait adulte.
Pas facile de s'écrire. Autant l'enfance a laissé un souvenir magnifique chez moi, où mon imagination traversait des mondes infinis sans aucune lassitude, autant l'adolescence est passée sans bruit. Je n'ai jamais aimé cette période là, où l'on découvre que le monde des adultes est souvent encore plus faux et hypocrite que ce qu'on soupçonnait déjà. Et puis, l'année de mes dix-huit ans, la mort. Celle de mon père, disparu en douze jours d'une maladie incurable. Rideau.
Et voila cette photo, peu de temps après ce cataclysme. Entre temps j'aurai eu le temps de m'égarer en "Maths Sup'", puis en "Maths Spé'", tout ça pour peu de choses, si ce n'est pour apprendre qu'on peut bosser soixante heures par semaine, se coucher chaque soir à une ou deux heures du matin quand on sait qu'on se lève à sept le lendemain. J'abandonnerai tout ça au bout d'un an et demi pour devenir Instituteur de la République, c'est à dire, dans un premier temps "normalien" (et salarié aussi, ce qui ne gâte rien)...
Cette photo, elle est prise de la fenêtre de mon appart, coincé entre la quatre voies, la ligne de chemin de fer, et la "Fonderie Nouvelle", qui dégueulait chaque matin sa fumée rousse sur la ville, grande tradition ardennaise venue de la nuit des temps.
Sur mon frigo, le vinaigrier surveille la rue par la fenêtre. (Le vinaigrier permettait de fabriquer du vinaigre de vin, en utilisant les fonds de bouteilles de rouge qui restaient quelquefois, après les chouilles) et la bougie "senteur des pins" toujours allumée pour éviter de se rappeler que la fumée de clop, à la longue, ça pue vraiment.
Pas facile de s'écrire. Autant l'enfance a laissé un souvenir magnifique chez moi, où mon imagination traversait des mondes infinis sans aucune lassitude, autant l'adolescence est passée sans bruit. Je n'ai jamais aimé cette période là, où l'on découvre que le monde des adultes est souvent encore plus faux et hypocrite que ce qu'on soupçonnait déjà. Et puis, l'année de mes dix-huit ans, la mort. Celle de mon père, disparu en douze jours d'une maladie incurable. Rideau.
Et voila cette photo, peu de temps après ce cataclysme. Entre temps j'aurai eu le temps de m'égarer en "Maths Sup'", puis en "Maths Spé'", tout ça pour peu de choses, si ce n'est pour apprendre qu'on peut bosser soixante heures par semaine, se coucher chaque soir à une ou deux heures du matin quand on sait qu'on se lève à sept le lendemain. J'abandonnerai tout ça au bout d'un an et demi pour devenir Instituteur de la République, c'est à dire, dans un premier temps "normalien" (et salarié aussi, ce qui ne gâte rien)...
Cette photo, elle est prise de la fenêtre de mon appart, coincé entre la quatre voies, la ligne de chemin de fer, et la "Fonderie Nouvelle", qui dégueulait chaque matin sa fumée rousse sur la ville, grande tradition ardennaise venue de la nuit des temps.
Sur mon frigo, le vinaigrier surveille la rue par la fenêtre. (Le vinaigrier permettait de fabriquer du vinaigre de vin, en utilisant les fonds de bouteilles de rouge qui restaient quelquefois, après les chouilles) et la bougie "senteur des pins" toujours allumée pour éviter de se rappeler que la fumée de clop, à la longue, ça pue vraiment.
Oui, c'est ici et à cette époque que j'ai rencontré celle qui deviendra Madame Archie. La seule vraiment capable de me supporter tout le temps, et qui, malgré ses coups de gueule légendaires, malgré les pièges et les tourments que la vie n'a pas manqué de nous envoyer, sait toujours aujourd'hui d'un seul coup d'oeil et sans une parole, détecter mon humeur, mes joies, mes tristesses, mes délires ou mes coups de pompes, bref : cet autre moi-même sans qui je ne pèse pas très lourd ...
Voila, en guise de préalable. Trois photos qui n'ont l'air de rien. Trois petites photos de rien du tout. Et pourtant, c'est bien là que tout se passe.
Tout, c'est à dire une irrésistible envie de toujours chercher à faire, avec ses mains, ses yeux, ses oreilles, sa bouche aussi. Faire et montrer. Tenter de répondre à toutes ces questions qui nous assaillent. Ecrire, décrire, tracer, coller, peindre, dépeindre, sculpter, taper, cogner la pierre, le bois, avec la rage de celui qui n'arrive pas à "rendre" lisible son ressenti. Balancer sa production, la détruire, la brûler, quitte à le regretter après. Réussir aussi. Parfois. Et en tirer un plaisir immense. Voila c'est tout ça, Archimia, même si à l'époque, je ne lui avais pas donné ce drôle de nom. Avec par-dessus tout : l'écoute, l'observation. Souvent, mon rêve serait d'être invisible pour ne rien perturber au moment de saisir une impression.
Voila tout ce que je tenais à écrire à propos d'Archimia. Je n'y reviendrai pas. Je crois bien que c'est à cause de ces trois photos que ce blog est né. Maintenant, on va passer à autre chose ...
Voila tout ce que je tenais à écrire à propos d'Archimia. Je n'y reviendrai pas. Je crois bien que c'est à cause de ces trois photos que ce blog est né. Maintenant, on va passer à autre chose ...
13 commentaires:
Photos dans les boites ou photos dans les albums...? voire photos dans les disques durs ! dur !
Ma vie est également jalonnée de photos ; ou plutôt de milliers de photos... coller, coller toujours, s'y coller...
Besoin de chronologie imagée pour tracer le chemin parcouru !
Elles montrent peu et beaucoup, ces photos, toute une vie, du noir, du blanc et toutes les nuances de gris.
Oui Ptilou, ce sont ces photos là mises bout à bout qui nous font avancer.
C'est curieux, Mère Castor comme ces petits rectangles de carton gris peuvent avoir d'importance dans nos vies.
En fait, l'informatique a beau faire ce qu'elle peut (et elle peut beaucoup), elle ne parvient pas pour l'instant à remplacer ces petits bouts de papier ... Il faudra que je réfléchisse à ce "besoin de toucher" un jour :))
Nous touchons des yeux la naissance d'Archimia; c'est difficile je trouve, de donner un sens aussi évident à ce que l'on fait (ou ce que l'on est, ou ce que l'on croit...). Tu m'impressionnes (normal avec des photos!!) et je savoure!
Ca n'est pas si simple d'extirper de soi des choses enfouies depuis si longtemps. Il m'a quand même fallu pas mal de temps avant de sortir ces quelques lignes, Yaëlle. Y réfléchir et se donner le temps est la seule clé possible, je crois ...
Moui, dis donc, ces photos sont magnifiques, elles "n'ont pas l'air du tout de rien"...et surtout, on sent la chaleur de l'argentique...
Purée...
Dorham : commentaire de connaisseur nostalgique, non ?
Le besoin de toucher, c'est vrai aussi pour les livres. Je pense que je ne pourrais pas lire un livre entier sur un "e-book"
Je crois aussi beaucoup au besoin de toucher Fleur, c'est pour ça que je râle toujours quand on a pas le droit, dans un musée (je comprends quand même aussi, mais bon !)
Quand au e-livre, j'ai eu l'occasion une fois de lire un roman complet, qu'un copain venait d'éditer et m'avait envoyé. Ça n'est pas si simple. Je ne dis pas que ça ne soit pas possible, mais il faut déjà bien "entrer" dans le livre avant d'oublier la technologie, notamment la molette pour faire avancer le texte.
Je crois que je suis comme toi : pour les bouquins, je préfère le papier (et je ne parle pas des livres anciens, ou des livres d'art) ...
Je reviens sur cette note. Elle sent bon les souvenirs et puis surtout pour dire que, en toute pudeur, tu y glisses ce beau message d'amour à Madame Archie. Je trouve ça magnifique.
@Constance :
:))
Parfois, j'avoue, je guette que personne ne voit, pour toucher les sculptures. Mais pas les peintures, parce que ça les abime vraiment trop.
Dans le livre d'Art d'Art, (le livre de l'émission de télé qui parle d'une oeuvre d'art en 1 mn), il y a une photo d'une installation de Joseph Beuys, un piano complètement recouvert de feutre, sur lequel est peint une croix rouge.
Le livre raconte que les gens ne pouvaient pas s'empêcher de toucher à l'endroit des touches, pour "voir". Et à force, ça s'est usé. Le musée a demandé à Beuys d'"arranger" en remplaçant le feutre, et Beuys l'a fait, mais a considéré que l'oeuvre avait évolué, et a placé à coté, sur une patère, le vieux feutre, et l'ensemble est la même oeuvre, mais évoluant au fil du temps. Et je trouve cette idée passionnante.
J'aime la Remington, elle est magnifique (magnifiée).
Heureux de te retrouver ici Audine.
J'espère que tu t'y sentiras bien.
Ton propos soulève un vaste débat. L'art est-il "intouchable" ? Et sinon comment le conserver pour les générations futures ? D'ailleurs faut-il le conserver ? L'art n'est-il pas aussi éphémère ?
De quoi nourrir des discussions sans fins, sans vainqueurs ni vaincus, mais qui soutendent une seule et même vérité :
l'Art est essentiel et indispensable à l'homme, quel que soit ce qu'il en fait ...
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