[] Archimia

26/12/2009

Ailleurs aussi

Archie vous laisse un peu,
Juste un peu,
Et s'en va quelques jours rejoindre son refuge,
Là-haut,
Coincé entre Vosges et Haute Saône,
Blotti dans des endroits où il fait bon parfois,
Tout en montant,
Prendre le temps de s'arrêter,
Pour regarder en arrière.

La vie est ainsi faite qu'on la passe à chercher.
Chercher à comprendre,
Chercher à lire l'autre
Et ce qui nous entoure,
Chercher à savoir pourquoi,
Pourquoi cette persistance du quotidien
Indifférente à nos joies et nos chagrins ?
Pourquoi cette peur du lendemain
Qui nous habite et nous ronge depuis le premier matin ?
Alors que ...

Patience : le futur ... ne fait que commencer !


A bientôt


23/12/2009

Ce soir

"Doux geste du réveil, ils avancent le front,
Et leur vague regard tout autour d'eux se pose...
Ils se croient endormis dans un paradis rose..."
(Rimbaud - Les étrennes des orphelins)
 



Passager d'Archimia égaré par ici,
Je ne t'adresserai
Qu'un seul souhait pour cette soirée :

Qu'à un moment ou à un autre,
Quand tu voudras,
Quand tu pourras,
Tu puisses retrouver,
Ne serait-ce qu'une seule seconde,
Ces yeux là.

21/12/2009

Pompéï

Lentement, la lave glacée a coulé,
Et recouvert d'un cristal pur et transparent,

Les hôtes de dame nature,
Emprisonnant à jamais,
Cette seconde d'inattention où l'eau se met à durcir.
La surface craquelée s'est transformée en mosaïque,
A chaque petit miroir sa réfraction,
Nul ne sait ce qui vit dessous,
Ni comment il nous voit,
Figé dans un silence absolu.
Dessus, on pense à une peau ridée, durcie,
Qui laisserait voir tout l'intérieur,
De nos espoirs ou de nos peurs,
Et je reste là, pensif,
A regarder le temps s'écouler,
Dans de curieux vaisseaux
Sanguins et sans couleurs :
La vie après la mort.
Encore.



19/12/2009

Jeux de glace

Moins onze degrés cinq, ce matin. C'est rigolo la météo : c'est toujours pareil, et c'est chaque fois nouveau... Voila ce que j'écrivais sur un autre blog, il y a exactement deux ans :



Avec du bois et de la glace,
Avec le soleil du matin,
Avec tout ce que je trouv' sur place,
Et qui disparaitra demain
,




J'écris des formes, de la lumière,
Joue avec l'ombre et le mystère.

17/12/2009

Noël, ça se fait chaque année



C'est sur cette chanson de Prévert, que je trouve extraordinaire (tant par la mélodie, que par les paroles) que je vous laisse dériver ce matin, sur la voix de Catherine Sauvage ...
Noël est un drôle de truc :
Un genre d'obligation morale,
Qui frappe à toutes les portes,
Des plus belles aux plus sordides,
Comme si tous les enfants du monde avaient au moins ce droit,
Celui d'être heureux ce soir-là.
Qu'ils aient les mains sales ou propres,
Qu'ils aient froid ou chaud,
Qu'ils aient vraiment faim ou qu'ils n'aiment pas la brioche.
Dans une semaine, le réveillon,
En même temps absurde et attendrissant,
Comme l'espoir dans les yeux d'un enfant,
Comme ce monde qu'on nous impose, tout en noir et en blanc.




15/12/2009

Matins givrés

Froid glacial sur la forêt, cette nuit.
Lentement, le fragile vaisseau de pierre,
De son écume de brume, surgit.
Le village d'Archie s'éveille,
Fripé, embué, embrumé, comme une belle,
Après une nuit trop agitée.
Le silence est déchiré par le tempo du vieux clocher.
Inhabité, comme déserté,
Il faudra attendre le passage du boulanger,
Pour voir un ou deux vieux, aller, venir et s'agiter,
Et tenter d'oublier les "moins huit" de la veillée.

Sagement, au boulot, Archie est déjà parti,
Quand il faisait encore nuit,
Continuer son bout de vie ...





14/12/2009

Les gardiens

Des fantômes dans la ville, en habit de totem,
Bordent le fleuve noir sur fond de requiem.

L'hiver, qui les dénude et l'homme, qui les nettoie,
Donnent à leur attitude un peu de désarroi.
Les gardiens débonnaires sous qui on s'abritait,
Sont devenus polaires, intimant le respect,
Et vois leurs mains crispées, dirigées ver le ciel,
Leurs doigts devenus crochus, menaçants : essentiels.




11/12/2009

Impression

Finalement, la vie, c'est un peu comme ce mur.
Droit, plat, immense,
Haut ; bien plus haut que soi.
Un patchwork d'aventures et d'histoires,
Cousues les unes aux autres,
Ficelées, couturées rattachées,
Certaines sont magnifiques,
Et on en garde une certaine fierté,
D'autres par contre,
Nous fichent la honte :
Elles sont de travers, fragiles, rafistolées,
Et tout l'ensemble est là, comme ça,
Peut-être solide, peut-être pas,
Et puis surtout, belles ou terribles,
Ces cicatrices, à la surface,
Qui nous rendent toujours un plus fort,
Un peu plus dur aussi.
Lentement, on change, on se transforme,
Trait après trait,
Tache après tache,
On se dessine sans apparaître vraiment,
Un peu comme dans une toile de Monet ...




10/12/2009

Vases communiquants

Nos quotidiens se vident et se remplissent,
Au gré des évènements,
Au fil du temps et des saisons.
On a toujours l'impression
Qu'ils n'en finiront jamais.
Des cris, des pleurs, du désespoir,
Ou de l'amour, du rire et de la joie,
Tantôt le niveau baisse, tantôt il monte,
Et nous veillons à bien entretenir la mécanique,
Pas de fuite,
Pas de bouchons,
Et puis soigner l'odeur :
Le quotidien ne supporte pas les mauvaises odeurs.
Fluide. A tous les sens du mot.
Tout ça doit rester fluide.
Un jour, le robinet se bloque et coule sans cesse,
Et le bac ne se vide plus ...
C'est là que ça se gâte : il n'y a pas de plombier du quotidien.

Je devrais arrêter de trop penser
Quand je nettoie l'évier...




07/12/2009

Buée

Méfiez-vous !
Les soirs de soupe ou les matins de potée,
On remonte le temps,
Si on s'approche trop près des carreaux de la cuisine.
On se revoit enfant,
L'index en avant,
A écrire comme un monde sur la vitre glacée,
On revoit la lumière coulant derrière les gouttes,
Créer de nouvelles formes, d'autres couleurs,
Tout un kaléidoscope de notre coeur,
Dessin qui finit par s'étendre, se déformer et s'écouler,
Dessin qui suit à dessein son destin,
Et qui s'achève en bas de la fenêtre,
Là où les rêves s'arrêtent.
On revoit aussi,
Mais en plus petit,
La mère qui râle qu'on va lui salir ses carreaux,
Et qui sait pourtant que ça ne sert à rien,
Il est déjà ailleurs,
Loin, tellement loin,
Que ça lui fait un peu peur, à la mère,
De voir que son gamin est à ce point rêveur ...




06/12/2009

Nature morte

Demain, Copenhague.

Comme un fil tendu dans la nuit,
Un souffle qu'on retient contre soi,
Le rire d'un enfant qui se noie.



05/12/2009

La nuit

Colonne Morris sous les branchages
A la fenêtre de l'hôtel, bien sage,
Archie revoit ces deux jours de colloque,
Autour de la violence à l'école,
Avec chercheurs, médecins, pédopsymachin-choses,
Impressionné par la simplicité de ces gens,
Qui l'écoutent et le questionnent,
Il se sent bien un peu petit,
Mais il a l'habitude.
Il se dit que c'est bien, forcément,
De se mettre à plusieurs,
Pour chercher des solutions,
Ici et ailleurs, dans une quinzaine de pays différents,
Parce que les enfants d'ailleurs ont des soucis aussi,
Il pense qu'on est déjà bien loin,
Du "ici c'est chez moi, et mieux qu'en face",
Du coup même, ceux là, il les efface,
Et regarde amusé sa colonne Morris,
Comme un gros épi de maïs.

Il y a des soirs comme ça
Où je veux bien croire à la grandeur de l'homme,
Quand il sait se mettre à plusieurs,
Pour avancer encore un peu plus loin,
Pour davantage aimer et protéger les siens,
Ses enfants,
Ces enfants-là.
Purée, Bohringer a raison :
C'est quand même beau, une ville la nuit ...



01/12/2009

Les petits trésors

Sur la cheminée d'Archie,
La vieille cheminée de chêne ciré, tu trouveras :
De grands pots de faïence par les ans, tout blanchis,
Rangés du sucre au sel, un peu comme des daltons,
Un peu moins criminels ou vraiment assagis,
Des pots de grès des Vosges, de raisins secs remplis,
Des moulins à café, tout de cuivre vêtus,
Avec une manivelle qui leur pousse par-dessus.
Des fraises de porcelaine,
Et autres bimbeloterie,
Qui contiennent ferraille ou bien menue monnaie,
En attendant leur tour, gentiment, patiemment,
Guettent calendriers, tombolas des enfants.
Tu verras aussi des bougies,
Pour les soirs de disette
Où le courant ne passe plus,
Des cruches, pots à épices, ou des boites d'allumettes,
Des vide-poches qui s'ennuient,
En guettant l'occasion.

Toute une population d'objets hétéroclites,
Tous en compétition, qui pourtant cohabitent,
Avec en plus, comme si ça ne suffisait pas,
De temps en temps Archie, qui y passe son doigt,
Pas pour voir la poussière, mais plutôt pour lisser,
Tout ce morceau d'histoire, d'un siècle et demi aîné,
Qui regarde passer les vivants du quartier.

La cheminée d'Archie, c'est un monde rien qu'à elle,
"Un fichu dépotoir !" s'exclament les rebelles,
C'est dire combien ceux-là n'ont pas vu ma poubelle ...



29/11/2009

A la pelle ..

Nous voilà déjà presque arrivés au dernier mois de l'année,
C'est l'époque des trois "F" : flotte, froidure et feuilles mortes,
Dans quelques jours, le grand délire commercial de Noël,
Nous fera oublier la grippe A, le chômage, Sarkosy et même la main de Henry chez les irlandais.
Ce monde me fatigue, me vieillit.
Et nous là-dedans ?
Ballotés comme les feuilles mortes sur la pavé,
Tantôt flottant dans l'eau des rigoles,
Tantôt échoués sur les dalles de pierres sales et humides,
Je nous vois ressemblant à de gros poissons hors de l'eau,
Résignés.
Résignés à attendre la suite.
Ce monde n'a plus de sens, ni de valeur.
Il n'a surtout plus d'espoir ..
Reste juste de larges dalles grises
Sur lesquelles nous dérivons.
Que nous arrive-t-il au juste ?
Toutes ses menaces sur nos têtes ...
Chaque jour, chacun espère que ça va passer à côté.
Juste à côté, mais à côté quand même.
Le silence s'installe.
Et chacun pour lui.
Nos compagnons d'aujourd'hui
Seront-ils les disparus de demain ?
Qu'importe, pourvu que ça passe à côté...





Reste que,
Si j'en crois les saisons,
Un jour, le printemps reviendra.
Alors, tenir, oui tenir jusque là,
Rien que pour voir.

26/11/2009

Douche surréaliste



Drôle d'impression ces arbres qui envahissent les douches,
Pressés qu'ils sont, de faire leur grande toilette d'automne,
Une fois les feuilles tombées.
Pourquoi faudrait-il être propre pour mourir ?
C'est vrai que eux ne sont pas vraiment morts,
Ils font juste semblant.
Ça fait quoi au juste de faire le mort,
Pendant tout un hiver, je me demande.
Et voila Archie à la dérive,
Avec ses questions quoi,
Avec ses questions qui,
Qui par dizaines arrivent,
Et voila qu'il pleut des questions,
C'est normal qu'il pleuve dans une douche,après tout,
Des tas de questions glissent et tombent au sol,
Elles deviennent molles,
Elles deviennent colle,
Ou bien alcool, formol, même vitriol.
C'est une odeur épouvantable qui sort des douches,
Les gens s'enfuient en hurlant,
Même les arbres arrivent à se boucher le nez,
C'est pas courant, je sais.
Heureusement, un responsable a téléphoné.
Et voila les pompiers qui arrivent avec une réponse,
Une réponse de responsable.
Une seule réponse pour toutes ces questions ?
Et voila une question de plus.
Archie n'ose pas se demander ce qu'il doit faire,
Ça serait sûrement une question de trop.
Il vole la réponse et s'enfuit chez lui,
En se promettant bien de ne plus passer par là,
A se demander n'importe quoi ...

24/11/2009

Petite comptine en deux temps trois mouvements

Le samedi, avec mon papi,
Au fond du parc bien engourdi,
On joue à cache-cache tout accroupi,
On fait les zouaves, on s'applaudit,
Comme un ballon, je rebondis,
Vous salue bien : il est midi !




22/11/2009

La cour des têtes

Petit cadeau en ce dimanche matin tardif :
La cour des têtes qui te lorgnent,
Dix-sept (sur dix-neuf) mascarons hilares, sérieux ou menaçants,
Attendent, depuis 1629, de rencontrer ta trogne...
Ancienne académie des exercices de la Principauté de Sedan,

(s'il vous plaît)
Elles sont là bien au calme,
En plein coeur de ville,
Mais un peu à l'écart,
Juste assez près pour en entendre les rumeurs,
Juste assez loin pour en limiter les horreurs,
Ici, tu peux rester, regarder, écouter,
Tu ne déranges que les chats, et les locataires ...
Mais ils sont habitués.
Ah oui ! J'allais oublier :
Passe la souris sur l'anim' pour la lancer,
Et monte le son, c'est mieux pour l'ambiance ...





19/11/2009

Petite balade rimbaldienne le long du canal des Ardennes

Le long ruban d'acier
Borde tes rêves dorés,
Toujours t'en vas, mené
Au gré des vents, forcé.
La tête, pleine de soleil,
En marcheur infini,
Te voila qui approche,
Près du village de Roche.
Là, tu retrouveras
Les traces de ses pas,
De ses semelles de vent,
Par lesquelles il s'en fut,
Marcher en écrivant,
Ou rêver en marchant,
S'imaginer ailleurs,
Se composer vainqueur,
Tout au long des chemins durs,
Là où passa Arthur.





"Libre, fumant, monté de brumes violettes,
Moi qui trouais le ciel rougeoyant comme un mur
Qui porte, confiture exquise aux bons poètes,
Des lichens de soleil et des morves d'azur ;"

17/11/2009

Les têtes

Ce soir, je suis un peu fatigué, et, je ne sais trop pourquoi, je repense à une expo que j'étais allé découvrir il y a quelques temps ...
Elles me font sourire,
Serrées, presque frottées,
Les unes aux autres,
On sentirait d'ici leur granulosité,
Mais ça serait tellement mieux du bout de l'index,
On tracerait peut-être des chemins,
Les reliant entre elles,
A travers le gravier.
On les imaginait têtes aveugles, sourdes et muettes, oeufs calcifiés,
Mais on les sent vivantes et calmes, comme reposées.




Dans toutes les civilisations du monde,
L'art est cet étrange territoire,
Caché aux confins de la raison,
Qui subsiste quand tout le reste est érodé.

Placé ainsi, il est le dernier rempart contre la folie.
Il m'aide à oublier ce quotidien sordide,
Cette mère, complètement ivre et sous cachets,
Qui pleurait qu'on voulait lui voler ses enfants
Tout à l'heure, en plein milieu de l'après-midi,
Qui secouait les grilles de l'école jusqu'à les décrocher,
Elle aurait bien aimé voir sa fille, là, tout de suite.
Mais sa fille, elle, n'aurait pas du tout aimé la voir.
Comme ça, dans cet état là. Devant les autres.

Alors pour éviter qu'une gamine ait honte de sa mère,
Nous dûmes parlementer pendant presqu' une heure,
Autour d'un petit café,
Avant qu'elle n'accepte de repartir,
Avant qu'elle n'accepte que je téléphone à sa mère à elle,
Pour qu'elle vienne la rechercher,
En attendant l'heure de la sortie.
Drôle de trait d'union :
De mère à fille,
De femme à femme.

Alors oui, ces sphères me font penser à ces mères à la dérive,
Qui semblent flotter au milieu des gravats,
Une existence mouvante en noir et en blanc.
Oui, heureusement que l'art est là,
Et l'écriture aussi,
Pour pouvoir gommer ces mots et ces images,
De temps en temps,
Pour pouvoir s'échapper,
Pour aller respirer ailleurs.

Aimer l'art.
Ça n'est pas parce que c'est beau,
C'est seulement parce que c'est.
Vital.

15/11/2009

Trouvaille

Ça y est, ça devait arriver.
C'est arrivé la semaine dernière.
Dimanche après-midi, très exactement.
A force de chercher et chercher sans relâche,
D'aller à pieds, par les routes et les chemins,
D'interroger les gens,
A force de visiter villages, hameaux, patelins,
De fouiller dans les rues,
De questionner les chiens,
De quadriller mon coin,
De l'Ardenne de schiste au bocage de Thiérache,
De la forêt d'Argonne à la craie de Champagne,
J'ai fini par dénicher
Ce que je n'osais plus espérer,
Au détour d'un chemin,
Le long d'une ferme en ruine,
J'ai trouvé l'arbre. Le seul. Le vrai.

Le pommier dont les fruits ne tombent jamais.



12/11/2009

Tout juste

Juste une photo comme ça.
Pour toi, pour moi,

Pour tout ceux qui la voient.
Une photo pour laisser courir ton imagination,
La laisser te guider aux pays des matins courts,
et des soirs embrumés,
En attendant d'arriver vers la fin de l'année,
Avant de basculer de l'autre côté.


Juste quelques pixels alignés,
Suffisamment serrés, solides, évocateurs,
Pour rappeler que oui,
Il fait bon vivre ici ou là,
A regarder filer le temps et les saisons,
A aimer la terre avec ou sans qui vivent dessus.

C'est important,
De temps en temps,
De se le rappeler.




A toi de causer, maintenant .

11/11/2009

Comme mes mots (dé) : rations

De commémos en commémos,
On finirait par ne plus vivre que dans le passé.
Alors à l'occasion de ce onze novembre, j'ai pensé,
Faire appel à un ami pacifiste, plus que jamais.
Ce couteau là, n'a jamais tué : il est en fer blanc,
Plus léger qu'une plume,
Il faisait partie du "mess kit" des soldats américains,
D'où le "RIA (Rock Island Armory) US 1911" gravé dessus.

Ce couteau là était dans ma maison,
Quand je suis arrivé il y a vingt-six ans.
Il m'attendait. Sagement.
Fiché entre deux pierres mal jointoyées d'un mur.
Ce couteau là, c'est le "couteau de quatorze",
Comme disent mes gamins, qui l'ont toujours connu.
Il sert à aller couper des salades ou des courgettes l'été, au jardin.
Et il ne sert qu'à ça.



Alors, aussi farfelu que ça puisse te paraître,
J'aimerais bien dédier ce jour à ce type,
Américain totalement inconnu, venu ici,
A des milliers de kilomètres de chez lui.
Je ne connais pas son histoire,
J'ignore si elle est tragique ou pas,
Mais j'aime à l'imaginer repartir au pays,
Une fois la guerre finie,
Et prendre le temps à la dernière seconde,
De glisser son couteau entre deux pierres,
De cette vieille baraque abandonnée :
Un clin d'œil de complicité,
Une façon de marquer un territoire, un souvenir,
Une façon de se passer le témoin, en quelque sorte,

Juste à travers le temps.

08/11/2009

Ce que les murs murent

J'ajoute ma pierre à l'édifice -si l'on peut dire- et je voudrais dédier cette photo à tous les murs qui ploient, se plient, se lamentent, se déforment, craquent, se fissurent, s'effondrent et finalement s'écroulent, de par le monde.
Murs, rassurez-vous :
On ne vous en veut pas.
Nous sommes comme ça,
Nous, les hommes.
D'ailleurs, ce sont souvent les mêmes,
Qui vous montent et vous démontent.
Au gré des vents,
Au gré des temps.



 

Qu'on sache bien et surtout qu'on se souvienne,
Qu'un mur à lui seul, n'a jamais rien réglé,
Même si tous les problèmes ne se sont pas envolés avec lui.

Qu'on se rappelle enfin aussi
Qu'un mur, aussi haut fut-il,
Futile,
Même fait de pierre, de béton ou d'acier,
Est beaucoup plus fragile,
Qu'une petite feuille de papier,
Sur laquelle des mots sont griffonnés,
Mots d'amour, poémes de liberté, fertiles :

Les mots des enfants des hommes.

Gros temps

L'automne, c'est aussi ...
Le temps des tempêtes,
Et des vents déchaînés,

De ceux que rien n'arrête,
Arbres déracinés,
Et déluges à perpète,
Qu'il fait bon regarder,
Caché derrière sa fenêtre,
A regarder passer,
Dans un ciel sans focettes,
Des morceaux d'un peut tout ce qu'on peut dessiner,
Embarqués par le vent, menés à la baguette ...





Qu'importe. Tant qu'il reste un café,
Une bière, et une galette.
On peut bien bouquiner,
Ou se faire une crapette.

06/11/2009

Essorage

Retour sur la place après les congés de Toussaint. Triste comme comme un paquet de gâteau vide au milieu d'une flaque d'eau dans la grand'cour de récréation ...

Tout va pour le mieux au pays des pauvres : gale et pédiculose se partagent largement le marché au profit de la grippe H1N1. Le téléphone de la maternelle n'est toujours pas réparé depuis le mois de juin. les étagères de la BCD attendent aussi d'être découpées et posées, depuis le mois de mai. Les bouquins restent sagement dans des cartons. Mais après tout, tout le monde s'en fout.

Ce qui nous reste de ministère n'a plus assez de sous pour payer les heures sup' des activités du soir (vous savez, depuis 2 ans, ça s'appelait "l'accompagnement éducatif" ou "les orphelins de 16 h 00 ", et ça devait être généralisé cette année dans toutes les écoles et collèges de France ...)
De toute façon, on en est plus à chercher des solutions. C'est fini. On a plus le moyen de tout ça.

Une collègue toubib m'a demandé d'intervenir à un
colloque de médecins scolaires sur le thème de la violence à l'école en décembre à paris. Je me dis comme ça que c'est pas bon signe pour moi, si je commence à faire figure de spécialiste qu'on écoute. D'un autre côté, depuis le temps que j'essaie de faire comprendre aux gens d'ailleurs ce qui se passe dans ces quartiers chaque jour ...





La déliquescence des services de l'état me fait penser à ce superbe reportage d'archives vu sur la deux l'autre soir à propos de la chute du mur de Berlin. Ces fascinantes images du pouvoir qui bascule, absurde, ubuesque, quelques minutes avant que des dizaines de milliers de berlinois passent, incrédules puis hilares, la frontière devant un garde totalement dépassé, qui vient de prendre la décision, contre l'avis de son supérieur, de pousser les barrières...

Finalement, je me dis qu'aujourd'hui , on en est pas encore là, mais qu'on s'en approche. D'un autre côté, il n'y a pas grand monde dans la rue. Alors si effondrement il y a, ce sera de l'intérieur, pas à cause de la rue, un genre d'implosion, peut-être ...

Ça donne envie de faire la vaisselle, tout ça. En faisant couler l'eau bien fort, bien chaude. Vous trouvez pas ?

04/11/2009

Princesse d'aujourd'hui

Et voici qu'Archie,
Toujours chevaleresque, t'emmène aujourd'hui,
Dans le château de la Belle au Bois Dormant,
Niché dans un patelin nommé Dohan,
Enserré dans une boucle de la rivière Semois,
Avec un "s" car elle coule encore en Belgique,
Alors que dés qu'elle arrive en France,
Elle se met en transe,
Et devient Semoy avec un "y" (condescendance ?)

Ici, calme et volupté,
Le silence apprivoisé,
En quelque sorte,
Où la princesse presque morte,
Attend patiemment le baiser,
D'un prince charmant en VTT ...





Tu vois, même ici, le temps passe,
Les modes s'effacent,
Et les légendes coriaces,
Prennent de l'audace.
Efficace.

03/11/2009

Polychromie

Petite série à propos des couleurs de l'automne,
L'automne est une drôle de saison,
Pas facile à aimer.
J'ai mis très longtemps à la découvrir, à l'apprécier.
Pas grave. Elle est sans rancune ...


Les pinces à linge semblent s'ennuyer,
Et le fil pleure en regrettant les draps
Qui séchaient gaiement au soleil du printemps,
Le silence et le froid guettent.
L'automne, c'est aussi cette explosion de couleurs sans limite,
Comme un dernier pied de nez avant l'hiver.
Des teintes qui tranchent dans le vif du paysage,
Comme si elles voulaient s'incruster en nous,
Comme un souvenir de teintes, un peu floues, un peu mélangées,
Qu'on voit sans regarder derrière les carreaux mouillés,













Le souvenir d'une page qu'on tourne,
Ni triste, ni gaie,
Mais qu'il faut tourner,
Avec, juste avant l'attente,
L'impression,
De finir en beauté.

02/11/2009

Capitaine, mon capitaine

Seul à bord du grand vaisseau,
Regarder les choses du haut,
Changer toujours son angle de vue,
Un peu comme dans le cercle des poètes disparus ...




31/10/2009

Surfaces

Lisses ou rugeuses,
Bombées, perforées,
Plates et sans reliefs, ou vallonées,
Granuleuses, chiffonnées, froissées,
Mates ou lustrées,
Tendues,
Dures, molles ou absorbantes,
C'est fou ce que le bout le l'index,
Peut inventer comme vocabulaire,
Pour se faire remarquer.





L'univers du toucher est celui,
Qui, dans les premiers, nous envahit,
Avec celui de l'ouïe,
Bien avant le monde du visuel et de l'écrit.

Alors, Mesdames et Messieurs les conservateurs de musée,
Chapeau à celles et ceux d'entre vous qui osent nous laisser toucher,
Nous laisser promener nos doigts,
Le long,
Tout au long,
D'univers,
Que les autres ne soupçonnent même pas.

28/10/2009

Mini-pause

Archie s'en va pour deux jours à Paris.
Du coup, Archimia s'ennuie.
Hé oui !
Tant pis.
A vendredi (les bras chargé de cadeaux jolis) ...




27/10/2009

Les fantômes ardennais

Voila. Tout est redevenu normal sur Archiland, après le passage du sauveur. Etonnant comme le moindre incident nous laisse démuni. Technologie ou pas, sophistiqué continue de rimer toujours avec fragilité ...
Et ces réflexions matinales me laissent dériver vers cet autre endroit qu'il me faut encore vous faire découvrir...


C'est un curieux endroit, situé en Ardenne belge (c'est à dire en Ardenne) en pleine forêt. C'est l'histoire d'un espèce de rêve. Disons plutôt une façon de penser ... Un ancien centre de vacances, nommé "Les Dolimarts".


Il avait été construit par les Mutualités socialistes (belges) au début des années 50. Il était composé d'une rotonde (resto, bowling, dancing ), de 51 bungalows éparpillés sur le terrain, et de quelques blocs d'habitat collectif, pour une capacité d'hébergement total de 1000 à 1200 personnes. Le tout relié par de petites routes éclairées par de petits réverbères, bien comme il faut ...

Seulement voila : le temps passe, et pas toujours comme on voudrait. Terminées les années d'insouciance où le mot "chômage" n'avait pas plus de sens que celui de "développement durable". Le tourisme de masse n'a pas comblé les espoirs attendus. Le site a périclité, la gestion en est devenue difficile, puis impossible. L'abandon final s'est situé vers les années 2000. Sans aucun projet de reprise (ou du moins projet "crédible") ...



Alors seulement est venu le temps des vandales.

Tous les escaliers de bois massif ont été tronçonnés, les lampadaires cisaillés, les frisettes détachées, et les sanitaires démontés. Voila pour les récupérateurs. Les autres se sont contentés de casser ce qu'il restait : c'est ainsi qu'il reste des télés éclatées au sol, des canapés éventrés, le restaurant a été incendié, etc ...
Par delà les faits, c'est surtout l'évolution du concept qui m'intéresse. J'essayais d'expliquer à mes enfants (qui, soit dit en passant, étaient horrifiés par l'architecture de ces années-là) que nos projets touristiques d'aujourd'hui pourraient très bien suivre le même sort un jour ... Vous imaginez, je ne sais pas, moi, ... le futuroscope dans cet état là ?

Reste que, par delà la stupidité humaine et son inconscience versatile, la nature, comme d'habitude, reprend toujours ses droits, et les fait valoir. L'automne et couleurs irradient de façon particulière dans ce cimetière peuplé de fantômes venus d'un autre temps.

Et la forêt est si belle qu'on repense à la carte postale qu'elle était ... il y a quarante ans.

25/10/2009

Quand la déesse hèle, l'ami se terre ...


Eh bien j'en suis sûr, Ô lecteur assidu, ou simplement égaré sur la toile, te voila perplexe devant mon silence total. Sache que, non, en dépit de mon statut de fonctionnaire, je n'ai pas quitté l'école vendredi à seize heures trente-deux pour filer illico vers une de ces merveilleuses côtes du sud des Etats-Unis pour y passer une semaine au soleil.
Non. Pas du tout. La réalité est beaucoup plus âpre.

Depuis vendredi, je n'ai plus ni téléphone, ni internet à la maison. En effet, un "regrettable incident " dû à un technicien de France Télécom qui intervenait plus haut dans le village, a eu pour effet d'intervertir nos deux lignes, celle de ma voisine et la mienne.

 




Je m'explique (car je te sens inquiet et dubitatif). Quand on appelle chez moi au téléphone, on tombe sur ma voisine. Et vice-versa. (je jure que je te dis la vérité). Je te laisse imaginer les innombrables situations de quiproquos que tout cela entraîne, et qui nous font bien rire, il faut bien le dire.
C'est ainsi qu'à longueur de journée, Dame Archie, s'entraîne donc à expliquer, que "non, elle n'est pas la nouvelle secrétaire de ma voisine, mais que pour la joindre, vous devriez plutôt composer le ..."

Heureusement, France Télécom reste un acteur majeur dans l'animation de nos petits villages isolés. Je pense qu'on devrait les décorer pour ça.

La malheureuse opératrice du service technique a été suppliciée pendant de longues heures jusqu'à ce qu'enfin elle lâche le morceau (ma femme est impitoyable dés qu'il s'agit de service public) : le technicien viendra avant mardi soir (je pense peut-être faire venir la presse locale, on ne sait jamais ...)

En attendant, privé de téléphone, mais surtout d'internet, j'en suis réduit à envoyer ce billet - pour que tu puisses le lire - à "Monsieur Blogger-75000 Paris", soigneusement roulé dans une clé USB, et ficelé à la patte de Gustave, mon fidèle pigeon voyageur ...

C'est ça, gausse-toi, sans-coeur, toi qui ignore la joie d'habiter de petits territoires en voie de développement, situés à moins de cinq jours de pirogue de nos métropoles...

Quant à moi, j'erre dans la maison, fièvreux et délirant, redoutant un monde absurde où, en tournant le robinet de l'évier, la lumière s'allume d'un coup ; un monde où il ne faut pas oublier d'allumer le four avant de prendre sa douche ; un monde encore où il faut passer chaque matin aux urgences pour ramasser son propre courrier qu'un "technicien" y a laissé pour vous.

Ainsi, pendant ce temps, tu pourras de défouler sur les commentaires d'Archimia, sans que je ne puisse rien répondre.
Mais je te préviens, profite : Mardi soir, ma vengeance sera terrible.

22/10/2009

Faux semblants

Quelquefois, la nature manque d'imagination,
Le ciel se met à ressembler à la terre,
Ou bien la mer au ciel,
La lune se prend pour le soleil,
Les fleurs deviennent des arbres,
Et les oiseaux des nuages,
Même le vent a des allures de gazelles,
Et les feuilles mortes décident de remonter.

Quand ça arrive, Archie s'en va en maugréant,
Qu'il n'y a plus de saisons,
Que tout fout le camp,
Et que le voisin ferait bien de rentrer ses poules au salon.

En fait, secrètement,
Il est pourtant bien content :
Même dérangeant, il adore le changement.




21/10/2009

Les crayons de couleur

Il y a des matins comme ça,
Où l'on a juste envie,
D'un peu de teinte dans l'air,
Alors on s'imagine gamin, avec, devant soi,
De gros crayons de couleurs,
Si gros qu'ils font partie du paysage,
Et puis doucement, mais doucement,
On commence à colorier, sans dépasser,
En s'appliquant, la langue sortie, la tête dehors.
Et le temps vient à passer,
Mais pas dans le bon sens,
On le remonte,
Aussi haut que les crayons peuvent colorier,
Puis, terminé, on se recule un peu,
Et on contemple satisfait, le résultat.
On appelerait bien la maîtresse,
Pour savoir ce qu'elle en pense,
Mais il n'y a déjà plus personne :
Le temps est un élastique qui se rembobine trop vite.

Il y a des matins comme ça,
Où on est un peu triste,
Sans trop savoir pourquoi.


19/10/2009

Vieillir

Quand je serai très vieux,
Décrépi, écaillé,
Quand je serai rouillé,
Ne sachant ni bouger, ni tourner,
Quand, on ne verra plus,
Dans mes yeux éclaircis,
Que le reflet d'un ciel

Pour toujours "encore gris",
Quand je vivrai dans l'ombre,
Tapi dans le souvenir,
Et que, même ma mémoire,
m' aura abandonné,
J'aimerais bien qu'un type,
Lunatique et barbu,
Passé là par hasard,
Sorti de sa tribu,
Vienne me tirer le portrait,
même ridé, même laid.




La vieillesse des autres,
Est tellement plus près que la nôtre,
Qu'il est bon de temps en temps,
De la regarder en face,
Histoire de lui laisser le temps,
De bien nous rattraper ...



17/10/2009

Envie

Partir,
Seul ou avec les siens,
Faire un tour en bateau,
Sortir du réel,
Plonger dans le rêve,
Pour une minute, une heure, qu'importe,
S' échapper du quotidien,
Flotter comme on s'envole,
Vers d'autres rives,
L'espace d'un instant,
Traverser d'autres couleurs,
Des horizons plus flous,
Regarder passer les autres,
Leurs contours moins nets,
Les voir disparaître lentement,
Se fondant dans cette masse colorée,
Et puis,
Revenir, rentrer,
Grandi,
Plus fort et plus patient,
Plus à même d'affronter ce monde,
De mieux le comprendre,
Pour avancer un peu ...





Ça me fait toujours cet effet là,
Quand je vois passer un bateau.

16/10/2009

Octobre

Saluons l'arrivée du grand froid automnal comme il se doit :

Les premières gelées d'octobre
Sont cette page qui se tourne dans l'année ...

Quand le soleil croît moins vite et moins loin,
Quand, les matins frisquets, on surprend son haleine,
Se fondre gentiment aux fumées des maisons,
Et quand, de loin en loin, on peut suivre sur la plaine,
Le grand serpent de Meuse, et son panache de laine,
Quand les contre-jours se font d'or,
Sur fond de ciel limpide,
Quand les hérons silencieux pourfendent le paysage,
Escortés de choucas qui battent la mesure,
Quand les vaches, qu'on soupçonne à peine dans les prés,
Cherchent difficilement quelque plante à brouter,





Moins quatre ce matin, et me voila ravi,
Le froid convient si bien aux gens de ce pays ...

14/10/2009

Parallèles

Entre les maisons du haut et celles du bas, il n'y a guère plus de deux cent cinquante kilomètres. Hé oui ! C'est comme ça : la France est un petit pays. Au moment où un type de vingt-trois ans va prendre le contrôle des maisons du dessus, plus personne ne s'intéresse à la maison du bas. Et pour cause, elle sera tombée l'hiver prochain. Ici, le gel est fait pour ça.




A moins de deux cent cinquante mètres de là habite une de mes mamans d'élèves. Hé oui ! C'est comme ça : ma ville est une toute petite ville. Elle a deux gamins de quatre et cinq ans et hier soir, vers seize heures trente, on s'est aperçu qu'ils avaient la gale.

J'ai expliqué à la maman que je ne pouvais pas les prendre à l'école (il y a éviction scolaire), qu'il fallait donc consulter, les soigner et ne les faire revenir que totalement guéris.

Mais cette maman là ne peut pas payer.
"Et la CMU ? Je n'ai pas la CMU, je suis en attente du RSA". Bon. Seize heures quarante-cinq : j'appelle l'infirmière scolaire du Réseau Ambition réussite : personne. Bon. J'appelle l'assitante sociale du collège d'à côté : personne. Seize heures cinquante : je viens d'avoir une infirmière scolaire d'un autre collège qui me suggère d'appeler le Centre d'action sociale de la ville. Je m'y précipite, il est seize heures cinquante-cinq. La personne m'explique que l'aide sociale ne fait plus de "bons" pour la gale, suite à une nouvelle décision. Bon. Jusque cinq heures dix, j'essaie plusieurs numéros : le centre médico-scolaire, le centre médico-social, ... mais là, cette fois, c'est fermé.


La maman attend patiemment dans mon bureau et ses gamins cavalent partout. Elle m'explique qu' en ce moment ils sont sept à la maison (des demi-frères plus âgés et qui ne sont pas tout le temps là)et qu'elle n'a pas de machine à laver ...

Bon. Il y a des soirs comme ça. Je finis par l'envoyer au SAMU. C'est pas terrible comme décision pour soigner une gale, mais c'est tout ce que j'ai trouvé et, au moins, ce sera gratuit.

"Mais ils vont me faire une ordonnance et je ne pourrai pas la payer !"
"Peut-être vous donneront-ils directement les médicaments ... sinon, allez voir les assistantes sociales du Centre médico-social demain avec l'ordonnance, elles vous aideront.
Et puis il va falloir qu'elles aillent chez vous pour voir comment votre appartement peut être désinfecté".

Désinfecté. En la regardant partir avec ses deux gosses. Je me dis qu'il y a peut-être plusieurs sortes de gales, celle qui s'attaque aux miséreux, et une autre, plus pernicieuse et moins connue, qui rongerait plutôt le monde de la politique et de la finance. Un genre de gale qui creuserait ses galeries en dessous, juste en dessous d'une certaine idée de la morale.

Pas facile à soigner non plus, celle-là.

12/10/2009

Les images de la ville

Des vitrines qui s'animent,
Et des gens transparents,
Des silhouettes qu'on habille,
Qu'on transforme en vivant,
Qui nous hèlent, nous appellent,
Nous interpellent, souvent.
Nous, gros insectes, par la lumière attirés,
Contre le verre si lisse, et venant se cogner.

Les images de la ville,
Nous entraînent dans leurs fils,
Englués.
L'addiction citadine
Fait de nouvelles victimes :
On se croit entourés,
Mais on est qu'isolés,
Les autres sont des mannequins,
Adroitement disposés,
Qui tentent de gommer,
D'autres réalités ...



 
... et c'est le soir venu que l'on retrouve enfin,
Solitude de l'instant et couleur de l'urbain.

11/10/2009

La porte bleue

En grand, la porte-écran,
Profite du soleil levant,
Pour faire son cinéma.
Lanterne magique,
Qui, dans l'ombre, fabrique,
Toutes sortes de chinoiseries ...

Poussez-là, tout disparaît !
Ne reste en place,
Qu'un souvenir fugace,
Juste le rappel d'un rideau au crochet ...

Puis, un peu comme au théâtre,
Les trois coups opiniâtres :

Je pousse la porte bleue,
Je saisis mon manteau,
Le rideau se lève, et ...
La journée peu commencer.






09/10/2009

Intrusion

Dés l'aube, quand le soleil revient,
Les chats-pardeurs du petit matin,
Envahissent silencieusement le terrain,
Et, de proche en proche,
De gouttière en gouttière,
Passent voir si tu n'as pas chez toi,
Ce qu'ils n'ont pas trouvé chez moi ...


08/10/2009

Fantaisie en jaune

Caméléon-capucine fait sa maline,
Capucine-caméléon se pavane en ton sur ton.


Et le crépi n'en revient pas :
Il cherche à limiter la feuille et son coeur de vert,

Elle voudrait tant qu'il veuille livrer son coeur de pierre,
Chacun retient son souffle et attend,
Le temps qu'il faut,
Que la nuit arrive et les fonde,
Dans le plus noir des noirs.




07/10/2009

Les prisons des hommes

Je me rappelle : elle était venue me dire qu'elle allait partir, qu'elle voulait quitter la ville avec ses deux enfants.

"Ici, c'est mort, de toute façon, je trouverai jamais de boulot..."

Elle disait qu'elle avait une amie, là-bas, dans le sud, à Pézenas (c'est dans l'Hérault), qu'elle allait descendre bosser avec elle, qu'elle voulait tout recommencer, tout reprendre à zéro.

Et les deux gosses, blêmes, frêles, de la regarder, elle, leur mère, surexcitée pour l'occasion, avec ce drôle de regard que peuvent avoir les mômes quand ils ne croient plus depuis longtemps à une histoire trop souvent répétee, ressassée.

Elle n'avait pas laissé d'adresse, elle avait quitté l'école comme on s'enfuit d'un pays, pensant sans doute que le geôlier, c'était moi, ou quelque chose comme ça.

Les mois avaient passé. D'autres étaient arrivés, repartis. Je n'y pensais plus : le bulldozer du quotidien est très efficace pour nettoyer les souvenirs ...




Et la voici devant moi, se tortillant, un peu comme une gamine prise en faute. Le retour à la case départ. Et les deux gosses, à côté d'elle. Huit-dix ans, ils n'ont guère changé, pendant ces sept mois, un peu plus pâles, plus résignés, un peu plus prêts à affronter cette drôle de vie, qui continue, comme un mauvais film, qui cahote en permanence d'ennuis en emmerdes, sans espoirs de projets, de changements. Comme vaincus.

Il est long et compliqué, le chemin du bonheur. Il arrive qu'on se croit libre, qu'on se trompe de prison, ou de geôlier. Il arrive aussi qu'on ne sache plus bien de quel côté des barreaux on se trouve, ni même au juste s'il y a des barreaux, s'il y a un "dehors".
Perdus. Je les sentais perdus tous les trois. Je n'ai pas interrogé la maman sur ce qui s'était - ou ne s'était pas- passé. Par pudeur. Je crois qu'elle a apprécié.

J'ai juste souri aux gosses en leur re-souhaitant la bienvenue, et les ai laissé partir en courant dans la cour de récré. Avec les autres.

06/10/2009

Les pays des hommes

Pays.
Pays de rien,
Pays de chien,
Pays de sueur, de labeur,
Pays de bois et de forêts,

De collines et de vallées,
De pâturages et d'usinage,
Pays de musique d'estampage,
Pays de fonte et de ferrailles,
Pays de grèves et de batailles,
A chaque guerre, envahi, terni, anéanti,
Pays qui souffre et qui résiste,
La paix revenue, isolé, délaissé, oublié,
Pays résigné,

Pays de froid, de gel, de neige,
Pays que les légendes assiègent.

Pays de pauvres gens,
De migrants et de voyageurs du temps,
Pays de hasard, de brouillard, de retard,

Mon pays.




04/10/2009

En ville

Ballade sur le trottoir,
Le long des murs ivoires,
Préférant aux vitrines,
Léchées avec application,
Lever le nez au ciel,
Et guetter du bas le voyageur,
Et ses fientes cruelles.

Coup d'oeil amusé du pigeon,
Juste dans l'oeil de boeuf,

Zut ! Raté, se dit-il, paré pour le plongeon,
Et le voila parti vers un endroit plus neuf ...

Et la ville est si belle quand elle est vue d'en haut,

Qu'on regrette ce coup d'aile qui nous fait tant défaut.



01/10/2009

Echec




C'est presque un échiquier,
Sur un plan vertical,
C'est au pied du château,
En guise de déco.
Bien loin du piédestal,
Les pièces ont disparu, même le cavalier,
Semble s'être fait la malle ...

Dame reine est partie,
Son roi est abattu,
Combat de l'illusoire,
Sur un morceau d'histoire,
Et je m'en vais déçu,
Retrouver la sortie.

Un clin d'oeil du matin,
Sous un soleil serein ...

30/09/2009

Spirales

Quand l'agriculteur du coin,
S'amuse avec la nature,
A l'arranger, la décorer, l'habiller...

Lentement, à grands tours de tracteur,
Du paysage, il crée un patchwork,
A admirer de tout en haut,
Et il déroule autour du bosquet,
Un andain qu'il tisse comme un fil,
Araignée minuscule, affairée à jouer son rôle,
Dans cette immensité ...



28/09/2009

Hésitation



Des caprices de la météo,
Aux humeurs de la réflexion,
On se perd toujours un peu.

Entre le dedans et le dehors,
A la fois rêvant de voir la pluie tomber,
Nous, bien au chaud, bien calfeutré,
Ou, tout autant, dans le jardin, de soleil baigné,
Refusant de comprendre pourquoi il faudrait s'abriter.

L'esprit humain est compliqué,
Et passe ainsi pas mal de temps,
A se tourner, se retourner,
A rechercher de quel côté,
Il serait le mieux placé,
Il pourrait le mieux savourer,
Sans tentative de regret,
Le peu de temps qui lui est compté ...
 

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